Avez-vous déjà ressenti cette angoisse sourde quand l’automne s’installe et que vous êtes propriétaire bailleur ? Cette période marque le début de la trêve hivernale, un dispositif qui, s’il protège légitimement les locataires vulnérables, peut devenir source d’inquiétude pour de nombreux propriétaires. Entre locataires en défaut de paiement et risques accrus de dégradations, comment vous protéger efficacement ?
J’ai récemment accompagné un client propriétaire qui s’est retrouvé avec un logement endommagé pendant cette période critique, sans pouvoir intervenir. Son assurance standard n’a pas suffi à couvrir les préjudices. Cette situation m’a poussé à explorer en profondeur les solutions assurantielles spécifiques à cette période sensible.
La trêve hivernale et ses impacts sur les propriétaires
La trêve hivernale représente cette période de l’année, du 1er novembre au 31 mars, pendant laquelle les expulsions locatives sont suspendues. Cette disposition, ancrée dans notre droit social, vise avant tout à protéger les locataires en situation précaire durant les mois les plus froids.
“La trêve hivernale est un principe fondamental de notre droit du logement, mais elle peut créer un déséquilibre temporaire dans la relation bailleur-locataire,” explique Maître Nicolas Ciron, avocat spécialisé en droit immobilier. “Les propriétaires se retrouvent parfois dans des situations où leurs droits sont mis en suspens.”
La loi du 27 juillet 2023 a toutefois apporté quelques ajustements, notamment concernant les squatteurs. Désormais, les occupants sans droit ni titre ne bénéficient plus systématiquement de la protection de la trêve hivernale. Cette évolution législative répond à une préoccupation croissante des propriétaires face aux occupations illégales.
Mais attention, cette exception ne s’applique pas aux locataires en situation d’impayés ! Même si votre locataire ne paie plus son loyer depuis plusieurs mois, l’expulsion reste impossible durant cette période. C’est précisément ce qui rend la trêve hivernale particulièrement délicate pour les propriétaires qui peuvent se retrouver privés de revenus locatifs pendant près de cinq mois, tout en restant responsables de leur bien.
Dans ce contexte, l’assurance habitation devient votre meilleur allié. Non pas l’assurance habitation standard que vous connaissez pour votre résidence principale, mais des solutions spécifiquement conçues pour les propriétaires bailleurs.
Les risques juridiques et financiers pour les propriétaires durant cette période
La période de trêve hivernale concentre deux types de risques majeurs pour les propriétaires : les dommages potentiels au bien immobilier et les questions de responsabilité civile.
Concernant les dommages, l’article 1732 du code civil rappelle que “le preneur répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute.” Cependant, en pratique, faire réparer ou compenser ces dommages peut s’avérer extrêmement complexe, surtout avec un locataire en difficulté financière.
“Les propriétaires sous-estiment souvent l’étendue de leur responsabilité civile,” souligne Olivier Audibert, agent d’assurance spécialisé dans l’immobilier. “L’article 1733 du code civil établit clairement que le propriétaire reste responsable en cas d’incendie, sauf s’il prouve que celui-ci est arrivé par cas fortuit, force majeure, vice de construction, ou communication du feu par une propriété voisine.”
Cette responsabilité persiste même lorsque le locataire est en situation d’impayé et que vous ne pouvez pas l’expulser. Imaginons un scénario malheureusement courant : un locataire en défaut de paiement, possiblement négligent avec le logement durant la trêve hivernale, cause un dégât des eaux qui affecte l’appartement du dessous. En tant que propriétaire, vous pourriez être tenu responsable des dommages causés.
Les risques financiers s’étendent bien au-delà des simples loyers impayés :
- Dégradations intentionnelles du logement par un locataire mécontent
- Charges de copropriété qui continuent de courir
- Frais juridiques pour les procédures d’expulsion (qui devront attendre la fin de la trêve)
- Impossibilité de remettre le bien en location pendant plusieurs mois
- Dépréciation potentielle de la valeur du bien en cas de dégradations importantes
Face à ces risques multiples et souvent sous-estimés, une protection assurantielle adaptée devient non pas un luxe, mais une nécessité absolue.
L’assurance propriétaire non occupant comme solution principale
L’assurance Propriétaire Non Occupant (PNO) constitue le socle fondamental de votre protection durant la trêve hivernale. Contrairement à une idée reçue, cette assurance n’est pas facultative, mais obligatoire depuis la loi ALUR de 2014.
“Je remarque que de nombreux propriétaires pensent à tort que l’assurance habitation souscrite par leur locataire les protège intégralement,” confie Marie Dufresne, courtière en assurance. “Or, cette assurance ne couvre que les risques locatifs, pas les intérêts spécifiques du propriétaire.”
Une assurance PNO de qualité vous protège contre plusieurs risques essentiels :
- Les dommages causés au bâti (incendie, dégât des eaux, événements climatiques)
- La responsabilité civile du propriétaire (si un défaut d’entretien de l’immeuble cause un accident)
- Les pertes de loyers suite à un sinistre rendant le logement inhabitable
- La protection juridique de base pour les litiges avec les locataires ou les tiers
Cependant, face aux risques spécifiques liés à la trêve hivernale, une assurance PNO standard montre rapidement ses limites. En particulier, elle ne couvre généralement pas :
- Les loyers impayés
- Les dégradations intentionnelles causées par le locataire
- Les frais d’expulsion et de recouvrement
- Les situations d’occupation illégale (squats)
J’ai personnellement constaté dans ma pratique professionnelle que les propriétaires qui négligent de souscrire une assurance PNO adaptée ou de la compléter par des garanties spécifiques se retrouvent souvent dans des situations financières catastrophiques. D’où l’importance de considérer des couvertures complémentaires, particulièrement durant cette période à risque.
L’importance des couvertures complémentaires (protection juridique et garanties loyers impayés)
Au-delà de l’assurance PNO classique, deux types de couvertures complémentaires s’avèrent particulièrement précieuses pendant la trêve hivernale : la protection juridique renforcée et la garantie loyers impayés (GLI).
“La protection juridique standard incluse dans les contrats PNO de base est généralement insuffisante face à des situations complexes comme les impayés durant la trêve hivernale,” explique Thomas Vernet, juriste spécialisé en droit immobilier. “Une protection juridique renforcée vous permettra de bénéficier d’un accompagnement complet, incluant des consultations d’avocats spécialisés et la prise en charge des frais de procédure.”
Cette protection juridique étendue couvre notamment :
- Les conseils préventifs avant la mise en location
- L’assistance pour les mises en demeure et commandements de payer
- La prise en charge des frais d’huissier et d’avocat
- L’accompagnement dans les procédures d’expulsion (préparation pendant la trêve, exécution après)
Quant à la garantie loyers impayés, elle constitue un filet de sécurité essentiel. Elle prend généralement en charge :
- Le remboursement des loyers non perçus (souvent jusqu’à 24 mois)
- Les frais de procédure pour récupérer les sommes dues
- Les détériorations immobilières causées par le locataire
- Parfois, la prise en charge des frais de relogement du locataire
Cependant, attention à bien vérifier les conditions d’application de ces garanties. La plupart des assureurs exigent :
- Une sélection rigoureuse des locataires (vérification de solvabilité)
- Des garanties comme la caution d’un tiers
- Le respect strict des délais de déclaration des impayés
“Les propriétaires qui souscrivent à ces garanties doivent être particulièrement vigilants sur les délais de déclaration,” insiste Olivier Audibert. “J’ai vu des assurés perdre le bénéfice de leur garantie pour avoir déclaré un impayé avec seulement quelques jours de retard.”
Ces couvertures complémentaires représentent un coût supplémentaire, généralement entre 2,5% et 4,5% du montant annuel des loyers pour une GLI complète, mais elles offrent une tranquillité d’esprit inestimable, particulièrement pendant la période critique de la trêve hivernale.
Évolutions et innovations des assureurs face à ces risques
Face aux défis spécifiques posés par la trêve hivernale, le marché de l’assurance immobilière connaît une évolution constante, proposant des solutions de plus en plus adaptées aux besoins des propriétaires bailleurs.
L’une des innovations majeures concerne la couverture contre les squatteurs. Historiquement, l’occupation illégale était rarement couverte par les contrats d’assurance classiques. “Nous avons développé des garanties spécifiques anti-squat qui incluent l’accompagnement juridique et la prise en charge des frais d’expulsion, même pendant la période hivernale,” explique Laurence Thibault, directrice produit chez un grand assureur français. “Les récentes évolutions législatives nous permettent d’être plus efficaces dans ces situations.”
Autre tendance notable : l’émergence de contrats modulaires permettant aux propriétaires de personnaliser précisément leur couverture en fonction de leurs besoins et du profil de risque de leur bien. Ces formules à la carte permettent d’ajuster la protection selon que le logement est situé dans une zone tendue, qu’il s’agit d’une location saisonnière ou d’un bail classique.
Les assureurs développent également des services de prévention plus sophistiqués :
- Analyse prédictive du risque d’impayé basée sur l’historique du secteur
- Assistance à la rédaction sécurisée des baux
- Solutions de télésurveillance à tarif préférentiel pour les logements vacants
- Applications mobiles permettant de documenter l’état du bien avant et après la location
“Nous observons une demande croissante pour des services d’accompagnement global, au-delà de la simple indemnisation,” note Sophie Mercier, courtière spécialisée. “Les propriétaires recherchent des partenaires qui les aident à sécuriser l’ensemble de leur parcours locatif.”
Cette évolution du marché reflète une prise de conscience collective : la gestion des risques locatifs nécessite une approche proactive et multidimensionnelle, particulièrement durant les périodes sensibles comme la trêve hivernale.
Conclusion et appel à l’action
La trêve hivernale, si elle répond à un impératif social indiscutable, représente une période particulièrement délicate pour les propriétaires bailleurs. Face à ces défis spécifiques, une protection assurantielle adaptée devient indispensable.
Je vous recommande vivement de réévaluer votre couverture assurantielle actuelle à l’aune des risques particuliers liés à cette période. N’hésitez pas à comparer les offres d’assurance non-occupant et à consulter un conseiller spécialisé qui saura vous orienter vers les solutions les plus adaptées à votre situation.
FAQ : Trêve hivernale et assurance habitation
La trêve hivernale s’applique-t-elle à tous les types de location ?
Non, certaines situations sont exclues du dispositif de trêve hivernale, notamment les occupants sans droit ni titre depuis la loi du 27 juillet 2023, les personnes entrées par voie de fait dans le domicile d’autrui, ou encore les locaux situés dans un immeuble ayant fait l’objet d’un arrêté de péril.
Mon assurance habitation personnelle couvre-t-elle mon bien en location ?
Non, votre assurance habitation personnelle ne couvre que votre résidence principale. Pour un bien mis en location, vous devez souscrire spécifiquement une assurance PNO (Propriétaire Non Occupant).
La garantie loyers impayés fonctionne-t-elle pendant la trêve hivernale ?
Oui, la garantie loyers impayés continue de fonctionner pendant la trêve hivernale. Elle vous indemnise pour les loyers non perçus même si vous ne pouvez pas expulser le locataire pendant cette période.
Comment protéger mon logement contre les dégradations pendant la trêve hivernale ?
La meilleure protection consiste à combiner une assurance PNO complète avec une garantie contre les détériorations immobilières (souvent incluse dans les contrats GLI). Vérifiez également que votre contrat inclut une protection juridique adaptée.
Les frais d’expulsion sont-ils couverts par l’assurance PNO standard ?
Généralement non. Les frais d’expulsion sont habituellement couverts par les extensions de garantie comme la protection juridique renforcée ou la garantie loyers impayés. Vérifiez spécifiquement ce point dans votre contrat.